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L’écriture est du mouvement

Arrêtés… Suspendus en l’air, figés dans le mouvement… Mes doigts sont arrêtés, bloqués au-dessus du clavier. Depuis un mois. Trente-quatre jours. Depuis que nous sommes tous arrêtés, dans nos vies et dans nos élans.

Enfermés, claquemurés, confinés… Comment faire sans mouvement ? Sans aller et venir, sans rencontrer, échanger, découvrir. La vie est du mouvement, l’écriture aussi. Dans l’immobile, rien ne vient. Pas d’inspiration. Pas de souffle. Souffler, inspirer : I can’t breathe…

La poussière a tout envahi. Elle occupe l’espace, épaisse, collante. Elle colle aux murs et enfle dans les rais de l’insolent soleil de printemps qui trouvent à se faufiler par les fenêtres. On la respire, on la mange. On essaie de l’avaler, ça ne passe pas. Elle obstrue nos poumons. We can’t breathe ! SOS Médecin ne répond pas : ils sont débordés…

On parle de nous bâillonner, de sortir couverts, nez et bouches scellés. L’autre est devenu un danger, une menace. Il faut s’en méfier, le craindre, le contourner. Faut-il bloquer nos respirations lorsque nous nous croisons ? Stop breathing !

Comment faire sans air, sans mouvement, sans geste ? Comment faire sans l’autre – tous les autres – source, puits, nourriture ? Déjà que nous nous auto-autorisons à sortir, va-t-il falloir que nous nous auto-consommions avant de nous auto-consumer ?

D’autres décrètent pour nous nos essentiels : produits, commerces, métiers. Peut-on modifier la liste ? J’ajouterais « vent », « large », « air pur », comme j’alimenterais un feu pour qu’il reprenne vigueur, joie, énergie. Souffle et inspiration… Qui me suit ?